Les traitements physiques améliorent-ils les résultats après une commotion cérébrale ? revue systématique et méta-analyse.

Kinesport
La commotion cérébrale est définie comme une lésion biomécanique traumatique du cerveau, causée par un coup direct à la tête ou un impact indirect sur une autre partie du corps. Le début des perturbations est d’apparition rapide et de nombreux symptômes cliniques différents peuvent en résulter (maux de tête, nausée, vertiges, troubles oculomoteurs, vestibulaires...). Même si la plupart des adultes s’en remettent en 14 jours, 10% à 30% gardent des symptômes sur le long terme ce qui affecte leur qualité de vie.

Les recommandations pour la prise en charge des commotions sont un repos cognitif et physique complet dans les 48 heures post-traumatisme puis un retour progressif aux activités physiques.

 Récemment, de nouvelles preuves sur l’importance des thérapies physiques pour la prise en charge des commotions de longue durée émergent. Ces traitements sont de l’activité aérobie sous-maximale, de la rééducation vestibulaire et/ou oculomotrice ainsi que de la thérapie cervicale.
Avis du pôle scientifique de Kinesport
Pastille verte
Cette revue systématique et méta-analyse est un article à faible risque de biais, tous les critères méthodologiques majeurs sont respectés permettant de limiter et contrôler au mieux les biais dans leur étude.
Cette revue systématique a donc pour objectif de répondre à deux questions :

  • Quels sont les effets de l’exercice aérobie sous-maximal, des thérapies cervicales, vestibulaires et/ou oculomotrices sur les symptômes aigus et de longue durée des commotions cérébrales ?
  • Quels sont les effets de l’ajout de ces thérapies dans des interventions multimodales adaptées sur chaque symptôme présent dans les commotions aigues ou de longue durée ? 

Méthode

Les articles inclus dans cette revue systématique proviennent de Medline, CINAHL, PEDro, Cochrane library, Embase et Scorpus et datent pour le plus récent du 5 Septembre 2020.

Les essais contrôlés randomisés inclus évaluaient les effets de l’exercice sous-maximal aérobie, des thérapies cervicales, vestibulaires et/ou oculomotrices sur les symptômes des commotions cérébrales (aigües ou de longue durée) ainsi que le nombre de jour nécessaire au retour au sport.

Les données extraites étaient l’âge des participants, le sexe, la présence de symptômes aigus ou de symptômes chroniques, le traitement mis en place, les effets et les résultats. Enfin, les essais ont été regroupés en fonction du type d’intervention (exercice, vestibulaire, cervicale ou oculomoteur) et en fonction de la mesure des résultats (score sur les symptômes ou nombre de jours de rétablissement).
La méta-analyse a été réalisée quand plus d’une étude pouvait être groupée, soit en fonction du type d’intervention, soit en fonction de la mesure des résultats (s’il n’y avait qu’une seule étude dans le groupe, les données statistiques étaient directement tirées de cette étude).
Les groupes considérés comme « contrôle » contenaient des patients n’ayant pas reçu de traitement ou ayant reçu un traitement placebo.

A noter que l’exercice aérobie sous-maximal était effectué à 80-90% du rythme cardiaque, correspondant au seuil auquel les symptômes des patients commençaient à s’exacerber.

Au final, 12 essais avec un total de 647 participants âgés de 12 à 54 ans ont été inclus. 7 études étudiaient les effets de l’exercice aérobie sous-maximal, une étude ceux de la thérapie cervicale seule et une étude ceux de la rééducation vestibulaire seule. Les autres études évaluaient les effets d’une prise en charge multimodale et adaptée aux symptômes du patient et incluaient donc différentes thérapies.

4 études s’intéressaient aux commotions aigües et 8 aux commotions de longue durée. La méta-analyse n’a pas été possible pour les traitements cervicaux et vestibulaires car une seule étude était incluse.

Résultats

 Effets de l’exercice aérobie sous-maximal (80-90% du rythme cardiaque)

Plusieurs scores portant sur les symptômes ont été réalisés après traitement par exercice aérobie. Les essais ont été séparés en fonction des symptômes aigus ou chronique. La méta-analyse a montré de meilleurs résultats dans les groupes d'aérobie par rapport aux groupes contrôles ; amélioration modérée dans les commotions aigues et amélioration légère à modérée pour les commotions de longue durée

 Effets des thérapies cervicale et vestibulaire

Concernant la thérapie manuelle cervicale chez les patients présentant des maux de tête persistants à la suite d’une commotion, une amélioration a été trouvée au bout de 6 semaines sur la douleur, mais elle n’est pas significative.

La rééducation vestibulaire a été pratiquée chez les patients souffrant de vertiges et de troubles de l’équilibre. Les auteurs ont trouvé une amélioration plus importante dans le groupe thérapie par rapport au groupe contrôle sur le score Dizziness Handicap Inventory mais pas sur les autres scores (Vertigo Symptom Scale-Short Form et Rivermead Post-concussion Symptoms Questionnaire). Aucun essai n’a investigué l’effet de la rééducation oculomotrice seule.

 Effets des thérapies multimodales individualisées

Deux essais de haute qualité ont évalué l’effet d’une thérapie multimodale composée de plusieurs traitements (cervical, vestibulaire et/ou oculomoteur) adaptés aux symptômes du patient sur le délai de retour au sport. Les auteurs de ces deux essais ont conclu que le retour au sport était plus rapide pour le groupe thérapie que le groupe contrôle. Une étude a montré un retour au sport 2 fois plus rapide chez le groupe thérapie, l’autre étude a conclu qu’à 8 semaine, les sujets thérapie était 3,91 fois plus apte à reprendre le sport.

En revanche, l’effet de cette thérapie multimodale personnalisée n’a pas montré de différence statistiquement significative sur les scores de symptômes chez les patients souffrant de commotions cérébrales de longue durée (pas de différence entre les groupes interventions et les groupes contrôles).

Discussion

Les interventions thérapeutiques physiques ciblées sur les déficits des personnes commotionnées réduisent leurs symptômes, qu’ils soient aigus ou chroniques. L’approche multimodale conduit à un retour au sport plus rapide chez les sujets avec des symptômes persistants.

L’exercice aérobie à intensité sous-maximale a montré des effets faibles à modérés sur l’amélioration des symptômes aigus ou chroniques faisant suite à une commotion cérébrale. De plus, ces études ont permis de montrer que ce type d’exercice aérobie n’aggravait pas les symptômes des patients, ce qui était encore inconnu à ce jour.

En revanche, les résultats concernant le temps nécessaire à la guérison suite à une commotion divergent selon les études. Cette revue n’a pas trouvé de différence significative entre les groupes aérobie et les groupes contrôles, mais certaines études affirment que les sujets ayant pratiqué des exercices aérobie ont besoin de moins de jours pour être complètement rétablis (Leddy an al’s - Early subthreshold aerobic exercise for sport-related concussion: a randomized clinical trial. 2019). Les différences de résultats pourraient être liées aux intensités des exercices qui ne sont pas les mêmes dans les études, ainsi qu’à la taille de l’échantillon. L’étude de Leddy et al’s présentant une grande cohorte, d’autres essais de grande taille devrait être menés afin d’éclaircir les divergences de résultats.

Les effets des thérapies (cervicales, vestibulaires et/ou oculomotrices) individualisées en fonction des déficits des sujets commotionnés sont variables. La thérapie cervicale seule, tout comme la rééducation vestibulaire seule, a un niveau d’efficacité limité. En revanche, ces thérapies montrent des effets positifs lorsqu’elles sont inclues dans un programme multimodal. Deux essais montrent que les thérapies individualisées inclues dans un programme multimodal permettent un retour au sport plus rapide. Dans le premier essai, le groupe suivant la thérapie a eu un retour au sport 2 fois plus rapide que le groupe contrôle ; dans le deuxième, les sujets avaient 4 fois plus de chance d’être apte à reprendre le sport à 8 semaines que les sujets contrôles.

Conclusion

Cette revue systématique a permis de fournir des preuves de niveau 1 concernant la prise en charge des personnes souffrant de commotions cérébrales. Les exercices aérobies sous-maximaux permettent de diminuer de façon modérée les symptômes des sujets et la thérapie multimodale individualisée permet quant à elle un retour au sport plus rapide et une diminution des symptômes chez les sujets ayant des troubles chroniques à la suite d’une commotion cérébrale.

De nouvelles recherches devraient être faites pour analyser les potentiels facteurs de risques de symptômes chroniques (âge, sexe, antécédents …) et pour déterminer la durée optimale de traitement ainsi que le meilleur moment pour débuter la prise en charge.

Référence article

Reid SA, Farbenblum J, McLeod S. Do physical interventions improve outcomes following concussion: a systematic review and meta-analysis? Br J Sports Med. 2022 Mar;56(5):292-298. doi: 10.1136/bjsports-2020-103470. Epub 2021 Sep 30. PMID: 34593371.