Syndrôme des loges d’effort chronique diagnostiqué par IRM et traité avec succès par fasciotomie assistée par endoscopie.

Kinesport
Le syndrôme des loges d'effort chronique (CECS) est une cause reconnue de douleurs aux jambes pendant l'activité physique. Ce syndrôme est un sous-ensemble du syndrôme des loges qui se définit par une pression accrue dans des compartiments musculaires spécifiques des membres, provoquant une compression des paquets vasculonerveux et entraînant l'apparition de symptômes. Le CECS a été décrit pour la première fois dans la littérature par Mavor en 1956, où la chirurgie s'est avérée être un traitement efficace. Cette pathologie affecte le plus souvent les membres inférieurs, mais des cas de CECS des extrémités supérieures ont été documentés. Les patients sportifs qui participent à des exercices de charge axiale répétitifs, comme la course de fond, présentent un risque accru de CECS. François nous traduit et synthétise cette fois-ci un Case report. 
Les symptômes se manifestent généralement pendant l’exercice et disparaissent avec le repos :

  • Engourdissements
  • Oppression
  • Raideur,
  • Douleurs et sensation de brûlure

Physiopathologie :


Bien que la pathophysiologie exacte du syndrôme de loge chronique d'exercice ne soit pas complètement comprise, il existe des théories dans la littérature qui déduisent une étiologie multifactorielle. Le déficit de compliance fasciale et l'augmentation de la pression au sein du muscle pendant l'exercice peuvent être la cause de cet état ischémique réversible.

Critères de diagnostic


Selon Pedowitz et al. :

  • Pression du compartiment avant l'exercice de 15 meme  
  • Pression du compartiment 1 minute après l'exercice supérieure ou égale à 30 meme  
  • Pression du compartiment 5 minutes après l'exercice de 20 meme  
  • Au moins un de ces critère doit être présent pour valider le diagnostic de cette pathologie.

Des publications plus récentes démontrent l'utilité de la mesure dynamique de la pression du compartiment intramusculaire pour diagnostiquer le CECS avec une plus grande sensibilité et une meilleure valeur diagnostique. L’IRM s’avère également être efficace pour réaliser le diagnostic.
Hg Hg Hg

Traitement :

Selon les auteurs, les options de traitement non invasives du CECS, telles que les massages, les étirements, les médicaments anti-inflammatoires et les orthèses, peuvent offrir un soulagement symptomatique temporaire mais ne permettent pas de contrôler la douleur ou les symptômes à long terme. C'est pourquoi la plupart des patients ont généralement besoin d'une intervention chirurgicale pour retrouver un niveau d'activité physique optimal et sans douleur.

La technique chirurgicale la plus fréquente est la fasciotomie spécifique à un compartiment. Mais une technique innovante et moins invasive consiste à réaliser cette fasciotomie assistée par endoscopie. Les auteurs de cette étude de cas expliquent dans cette étude l’utilisation de l’IRM avant et après exercice physique pour diagnostiquer un syndrome des loges d’effort chronique.

Cas clinique :

  • Homme (47ans) 
  • Douleurs bilatérales à la jambe et au pied après 10-20min d’effort 
  • La douleur a commencé dans les jambes mais a progressé vers le bas, entraînant finalement des paresthésies dans les pieds. 
  • Disparition des douleurs après l’arrêt de l’activité 
  • Diminution générale de sa qualité de vie, car il était incapable de poursuivre son niveau d'activité physique. 

Une IRM des membres inférieurs avant et après l'effort a été demandée pour déterminer si des anomalies d'imagerie pouvaient être mises en évidence.

Protocole :


1. IRM du membre inférieur pré-exercice
2. Le patient a ensuite couru à allure préférentielle sur tapis roulant jusqu'à ce que ses symptômes de douleur soient déclenchés (environ 20 minutes de course) roulant
3. Après apparition des douleurs, il a été rapidement raccompagné dans la salle d'imagerie où l’examen post-exercice a été réalisé.

Résultats d’imagerie :


L'imagerie du mollet du patient avant l'exercice n'a pas révélé de signal anormal ; cependant, un muscle soléaire relativement hypertrophié était évident (Fig. 1). Fleckenstein et al. ont constaté une augmentation de courte durée d'environ 12 % de l'intensité du signal T2 du muscle normal après l'exercice. Ces résultats ont révélé une augmentation de 23 % de l’intensité du signal dans le compartiment postérieur profond et une augmentation de 29 % dans le compartiment postérieur superficiel (gastrocnémien médial).

Compte tenu du scénario clinique du patient et des résultats de l'IRM, les auteurs ont diagnostiqué un syndrôme chronique de compartiment à l'effort. Étant donné la chronicité des symptômes et l'échec de la prise en charge conservatrice, le patient a opté pour une intervention chirurgicale. Une fasciotomie mini-invasive assistée par endoscopie des compartiments postérieurs superficiels et profonds de l'extrémité inférieure a été réalisée.

Chirurgie

Trois incisions longitudinales ont été pratiquées juste en arrière du bord médial du tibia (Fig. 3). Ensuite, une incision longitudinale le long du fascia superficiel a été réalisée sur toute la longueur du membre inférieur. Ensuite, un endoscope a été passé par l'incision la plus proximale pour aider à visualiser et à inciser tout fascia superficiel restant (Fig. 4). Les muscles gastrocnémiens et soléaires sous-jacents ont été rétractés sur le côté et un processus similaire a été répété pour le fascia sous-jacent du compartiment profond afin de dégager le muscle fléchisseur commun des orteils. Une dernière incision a été faite de manière similaire avec un guidage endoscopique pour séparer le muscle fléchisseur commun des orteils et le muscle tibial postérieur. L'endoscope a ensuite été retiré, les incisions ont été suturées et les plaies ont été pansées de manière stérile.

Discussion :


Jusqu’à présent, la technique la plus utilisée pour diagnostiquer un CECS était la manométrie avec aiguille post-effort, présentant plusieurs limites :

  • Technique invasive
  • Douloureuse
  • Variabilité des mesures intercompartimentales

L'IRM s'avère être un moyen non invasif efficace pour diagnostiquer le syndrôme du compartiment à l'effort chronique. Ces résultats sont en corrélation avec ceux indiqués dans l’étude de Verleisdonk et al. Dans une étude ultérieure portant sur 76 patients, les protocoles d'IRM post-exercice ont permis d'identifier les cas de CECS avec une sensibilité de 96 % et une spécificité de 87 %.

Les patients ayant bénéficié d'une intervention chirurgicale pour leur CECS avaient un taux de satisfaction post-traitement plus élevé que ceux utilisant des plans de traitement non opératoires. Les options de prise en charge chirurgicale du CECS dans le membre inférieur comprennent la fasciotomie ouverte, la fasciotomie à incision unique, la fasciotomie percutanée et la libération du compartiment assistée par endoscopie. La technique assistée par endoscopie a montré un résultat positif chez le patient présenté dans cette étude avec un retour de l'état fonctionnel et aucune complication postopératoire à court terme.

TAKE-HOME MESSAGES :


  • L'IRM s'avère être un moyen non invasif efficace pour diagnostiquer le syndrôme du compartiment à l'effort chronique.
  • Le traitement chirurgical est le traitement à privilégier en cas d’échec du traitement conservateur.
  • La fasciotomie mini-invasive assistée par endoscopie des compartiments postérieurs superficiels et profonds de l'extrémité inférieure semble être une technique chirurgicale fiable pour le rétablissement fonctionnel du patient tout en évitent toute complication post-opératoire.

L'article

Paul L. Wasserman, Matthew Montanarella, David Szames, Chandana Kurra, Morgan Garcia, Kristin Taylor, Jason A. Piraino. MR diagnosed chronic exertional compartment syndrome successfully treated by endoscopically-assisted fasciotomy. Radiology Case Reports 16 (2021) 1378–1383. https://doi.org/10.1016/j.radcr.2021.03.009