Test des effets de 4 semaines d’entrainements basés sur des jeux réduits de football extrêmes et moyens : une étude se focalisant sur les changements de direction, la hauteur de saut vertical et le profil locomoteur

Kinesport
Les jeux réduits sont des exercices pratiques sous contrainte utilisés pour stimuler la dynamique de jeu tout en entrainant les joueurs sur la base d’objectifs précis donnés par le coach. Ils peuvent être différenciés en fonction du format (extrême : 1vs1 / réduit : 2vs1 jusqu’à 4vs4 / moyen : 5vs4 jusqu’à 7vs7 / grand : >8vs7), de la surface de terrain par joueur ou encore des objectifs donnés. Leur popularité dans les milieux du football et de la science provient du fait qu’ils développent des aspects physiologiques, physiques, techniques et tactiques spécifiques. Les études actuelles ont montré que le nombre de joueur impliqués dans ces exercices entraine des variations dans les réponses physiologiques et physiques. Par exemple, les jeux extrêmes et réduits sont plus exigeants sur le rythme cardiaque et le taux d’effort perçu alors que les jeux plus grands entrainent une plus grande distance parcourue par les joueurs au-delà de 14km/h et de plus grandes contraintes mécaniques.

Les études sur les effets à long-terme des jeux réduits les comparent généralement à des exercices de HIIT (High Intensity Interval Training) basés sur de la course et les résultats montrent que les jeux réduits augmentent les performances aérobies des joueurs tout comme le HIIT. En revanche, les résultats sont disparates quant à leurs effets sur l’amélioration des performances de saut, de sprint linéaire, de répétitions de sprints à haute intensité et de changement de direction.
Avis du pôle scientifique de Kinesport
Pastille verte
Cet essai clinique randomisé est un article à faible risque de biais, tous les critères méthodologiques majeurs sont respectés permettant de limiter et contrôler au mieux les biais dans leur étude.
Sachant que le HIIT peut se différencier sous des formes plus ou moins longues, qu’il entraine des réponses aigues périphériques variées en fonction du type de séance et qu’il présente des similarités avec les jeux réduits, ces derniers pourraient aussi entrainer des adaptations différentes chez les joueurs en fonction du format choisit. L’objectif de cette étude sera d’analyser les effets de deux types d’exercices réduits (extrême en 1vs1 et moyen en 5vs5) sur les adaptations physiques de jeunes joueurs non-professionnels. Les effets de ces programmes seront spécifiquement analysés sur le temps au 5 – 0 – 5, le countermovement jump (CMJ) et la vitesse finale au 30 – 15 Intermittent Fitness Tests (VIFT).

Méthode

Cette étude randomisée en parallèle a inclus 20 footballeurs de l’Université de Gazi (Turquie) et les a séparé en deux groupes de 10 : 1vs1 pour le groupe A et 5vs5 pour le groupe B. Les critères d’inclusion étaient : joueur de champs, participation à toutes les séances d’entrainement, pas de prise de boisson énergétique ou de médicament et pas de changements dans les habitudes alimentaires. L’âge moyen des joueurs était de 17 ans avec environ 7,5 années d’expérience dans le football.

Les jeux réduits étaient faits en plus de l’entrainement habituel des joueurs. Il n’y avait pas de différences significatives entre les deux groupes après les premiers tests physiques. La première semaine a été consacrée aux tests : 5-0-5, CMJ et VIFT. Suite à cela, les joueurs ont suivi le programme d’entrainement en jeu réduit sur 4 semaines, à raison de 2 fois par semaine et suite au protocole FIFA 11+ pour l’échauffement. Le groupe A a effectué le 1vs1 sur un terrain de 15 x 10 mètres, correspondant à une surface de 75m² par joueur et le groupe B a effectué le 5vs5 sur un terrain de 40 x 30 mètres, correspondant à une surface de 120m² par joueur. Le 1vs1 s’est déroulé en 4 x 30 secondes avec 2 minutes de repos passif et le 5vs5 en 4 x 4 minutes, toujours avec 2 minutes de repos passif.

Lors de la 6ème semaine, après 24heures de repos, les tests effectués avant le protocole ont été refaits dans les même conditions que la première fois et les résultats ont été comparés. Le CMJ, mesuré grâce aux cellules photoélectriques Optojump, a été effectué 3 fois et la meilleure hauteur de saut a été gardée pour l’analyse. Les participants ont effectué deux fois le test de changement de direction 5 – 0 – 5 et le meilleur temps a été gardé pour l’analyse. Enfin, le 30 – 15 Intermittent test qui était déjà familier à tous les participants a été réalisé une fois par chaque participant et la valeur gardée était la vitesse finale (au moment de l’arrêt du test).

Résultats

 5-0-5

Diminution du temps au test de -4,82% dans le groupe 1vs1 et de -4,26% dans le groupe 5vs5. Il n’y avait avant l’intervention pas de différences entre les deux groupes, ce qui donne une amélioration significative du temps au test de changement de direction, plus marquée dans le groupe 1vs1.

 CMJ

Amélioration de la hauteur de saut de 1,7% dans le groupe 1vs1 et de 1,2% dans le groupe 5vs5. Pas de différences significatives entre les deux groupes n’ont été trouvées que ce soit avant ou après l’intervention.

 VIFT

Amélioration de la vitesse de 2,6% dans le groupe 1vs1 et de 3% dans le groupe 5vs5. Tout comme le CMJ, les résultats en pré- et post-intervention ne montrent pas de différences significatives entre les deux groupes. 

Discussion

Le jeu réduit extrême semble un peu plus avantageux que le jeu réduit moyen pour améliorer les qualités de hauteur de saut vertical et de changement de direction, et montre des effets en seulement 4 semaines d’entrainement. Cela est en accord avec de précédentes études ayant montré une amélioration de 5,1% sur le temps aux changements de direction chez des U-17 suite à un programme d’entrainement en jeu réduit. Ce type d’entrainement comporte de nombreuses accélérations et décélérations par minute ce qui peut expliquer les adaptations positives observées sur les changements de direction. Il est intéressant de noter que ces améliorations surviennent aussi lors de jeux réduits de plus grande taille, même si ce type de format comporte moins d’accélération / décélération. L’entrainement en jeu réduit semble donc présenter de nombreux bénéfices pour les footballeurs sur l’amélioration du temps au 5-0-5, mais les études futures devraient se concentrer sur l’analyse de la relation dose – réponse.
Concernant le VIFT, une précédente étude sur le basketball a montré une amélioration de la vitesse de 4,1% suite à un entrainement en jeu réduit, ce qui est en contradiction avec les résultats de cette étude qui ne montrent pas de différence significative avant et après l’intervention. Cela pourrait être dû au plus faible nombre d’actions à haute intensité dans cette étude par rapport à la précédente. De plus, les actions au basket se réalisent à haute intensité sur des terrains de 15 mètres, alors que les footballeurs sont habitués à couvrir de plus grandes distances et développent donc leur vitesse maximale sur un temps plus long. Bien que le VIFT semble dépendant de la puissance aérobie, il est faiblement en relation avec la charge interne et il semblerait qu’il faille de plus grandes charges externes, telles que la distance, pour augmenter la vitesse sur ce test. Les jeux réduits ne présentent donc que de faibles stimuli sur les actions à haute vitesse et ils devraient être accompagnés d’entrainements spécifiques complémentaires si l’objectif est de développer des capacités de haute vitesse.

Concernant le CMJ, une précédente étude a relevé une amélioration de la hauteur de saut de 1,9% suite à des exercices de jeu réduit allant de 1vs1 à 3vs3, ce qui est en accord avec les résultats de cette étude pour le groupe 1vs1. En revanche, d’autres études ayant analysé des formats de jeu de 4vs4 et 5vs5 n’ont pas relevé d’améliorations au CMJ. Les formats plus réduits et surface de jeu plus faibles améliorent donc d’avantage le CMJ que les formats plus grands. Cela peut s’expliquer par l’implication des joueurs ; les formats réduits entrainant plus de duels et de tacles et nécessitant donc plus de force et de puissance. Enfin, il faut noter que dans cette étude les exercices de jeu réduit étaient effectués seulement 2 fois par semaine, ce qui est inférieur à de précédentes études ayant observé des améliorations ; le nombre de sessions par semaine pourrait avoir une influence sur les adaptations physiques chez les joueurs.

D’un point de vue pratique, les entraineurs sont donc encouragés à introduire les jeux réduits ainsi que des tâches spécifiques sur chaque session d’exercice pour en maximiser les effets. D’autre parts, les études à venir sur le sujet devraient s’intéresser à différents facteurs : un nombre de session plus grand par semaine ; des séances plus longues pour analyser les différents formats de jeux réduits et leurs différents effets sur le 5-0-5 et le VIFT ; les interactions entre les jeux réduits moyens et extrêmes dans le but de maximiser leurs effets positifs sur les adaptations physique des joueurs. Enfin, il faut noter que cette étude s’est intéressée aux jeunes footballeurs non-professionnels et qu’il ne faudra pas généraliser ces résultats à toutes les populations, notamment aux professionnels.

Conclusion

L’exposition des jeunes footballeurs à des jeux réduits en 1vs1 2 fois par semaine pendant 4 semaines améliore les changements de direction ainsi que le saut vertical, mais ne change pas le profil locomoteur (vitesse maximale). Leur exposition à des jeux en 5vs5 améliore aussi leurs changements de direction mais sans changement sur la hauteur de saut vertical et le profil locomoteur. Les duels sont donc une approche intéressante pour créer des activités de puissance avec un transfert positif sur les qualités physiques des joueurs. Les entraineurs devraient donc mettre en place des jeux réduits extrêmes dans leur programme d’entrainement afin de créer un stimulus de haute intensité améliorant certaines habilités telles que le saut vertical ou les changements de direction.

Référence article

Makar P, Praça G, Kawczyński A, Akyildiz Z, Yıldız M, Aquino R, Clemente FM. Testing the effects of 4-week training programs based on extreme and medium-sided soccer games: a study focusing on change-of-direction, vertical jump height and locomotor profile. BMC Sports Sci Med Rehabil. 2022 Nov 24;14(1):199. doi: 10.1186/s13102-022-00592-1. PMID: 36424656; PMCID: PMC9686108.