Les blessures de type luxation antérieure et l’instabilité associée touchent principalement des sportifs jeunes et à haut niveau. Les procédures de stabilisation (réparations de Bankart arthroscopiques, procédures de Latarjet et variantes) cherchent à permettre le retour au niveau antérieur de compétition tout en minimisant le risque de récidive. Pourtant, alors que les athlètes et leurs équipes exigent des décisions claires pour la reprise, la littérature offre des résultats hétérogènes et des critères de « clearance » souvent imprécis. La scoping review de Fails & Popchak rassemble les données récentes et met en lumière à la fois des performances globalement favorables et des lacunes méthodologiques majeures.
- Population analysée : 2 187 athlètes (2 237 épaules) à compétition.
- Retour au sport au niveau antérieur (RTSP) global : 82,3 %.
- Taux de récidive global : 7,0 % (sur 2 186 épaules renseignées).
- Par procédure : Bankart arthroscopique — RTSP 79,7 %, récidive 9,2 % ; Latarjet — RTSP 87,4 %, récidive 3,1 %. Ces chiffres montrent une tendance à de meilleurs résultats de stabilité après Latarjet dans les séries incluses, mais les plages sont larges et la qualité méthodologique varie.
- Temps moyen déclaré pour retour libre : très variable — de 11 semaines (protocoles accélérés) à 8,4 mois ; la majorité des publications (≈69 %) rapporte des délais ≥ 5 mois avant clearance complète.
Les études incluses mentionnent dix domaines distincts comme critères de clearance ; la force et l’amplitude de mouvement (ROM) sont les plus fréquemment citées (chaque critère rapporté dans 44,8 % des études). D’autres domaines incluent douleur, tests fonctionnels/sport-spécifiques, endurance, proprioception, intégration du kinetic chain, readiness psychologique, absence d’appréhension et imagerie (p. ex. union du greffon après Latarjet). Cependant, peu d’études fournissent des seuils ou des pass/fail clairement définis — la plupart se limitent à des formulations du type « force proche du côté sain » ou « ROM complet ». Le constat central : on observe de la variété, mais peu de standardisation.
La majorité des études (93 %) est rétrospective ; les scores méthodologiques MINORS moyens sont faibles (non-comparatives : 8,6/16 ; comparatives : 14/24), ce qui limite la force des inférences causales. Les cohortes sont hétérogènes (âge, sport, niveau, procédure, suivi) et la plupart des séries comportent une proportion très élevée d’athlètes masculins — prudence donc pour l’extrapolation aux populations féminines ou amateurs. Les auteurs appellent clairement à des études prospectives multicentriques testant des algorithmes de critères (CBRTS) standardisés.
En synthèse, ≈82,3 % des athlètes retrouvent leur niveau antérieur ; le taux de récidive rapporté sur l’ensemble des séries est d’environ 7,0 %. Ces moyennes masquent toutefois de grandes variations entre études et procédures.
Les séries incluses montrent une tendance : Latarjet → RTSP ≈ 87,4 % et récidive ≈ 3,1 % ; Bankart arthroscopique → RTSP ≈ 79,7 % et récidive ≈ 9,2 %. Cependant, ces différences peuvent refléter des biais de sélection (indication, profil du patient, niveau sportif) et l’hétérogénéité méthodologique ; elles ne constituent pas une preuve définitive de supériorité universelle.
La littérature identifie une batterie multi-domaines : douleur, amplitude articulaire, force (isométrique/isocinétique), endurance/power, tests fonctionnels et sport-spécifiques (ex. CKCUEST, seated shot-put), proprioception/contrôle scapu-huméral, readiness psychologique, et imagerie si nécessaire. En pratique, les études manquent de cut-offs standardisés — d’où la recommandation d’un processus criteria-based documenté.
Les limites majeures sont : prédominance d’études rétrospectives, forte hétérogénéité (populations, sports, procédures, suivi), scores méthodologiques faibles et absence de seuils validés. En clinique, cela implique de ne pas se fier au temps seul, d’appliquer une approche criteria-based multidisciplinaire (chirurgien, kiné, préparateur, psychologue), de documenter précisément tests/méthodes et d’utiliser des batteries répétables plutôt que des règles temporelles arbitraires. La recherche future doit fournir des études prospectives multicentriques et des cut-offs prédictifs.
La plupart des chirurgiens et des études prennent le temps postopératoire en compte (surveys montrent que le temps est un critère de base), mais la time-only strategy est insuffisante. Le délai moyen de clearance rapporté varie largement et ne prédit pas à lui seul la sécurité du retour.
Un processus décisionnel structuré doit combiner plusieurs domaines : douleur, ROM, force (isométrique/isocinétique), endurance, puissance, tests de stabilité/apprehension, tests fermés (CKCUEST, seated shot-put), évaluation du kinetic chain, et readiness psychologique (ex. SI-RSI). Les preuves suggèrent que l’utilisation d’un protocole CBRTS peut réduire la récidive (une étude rétrospective signale un risque de récidive moindre chez les athlètes testés par CBRTS).
Les batteries mentionnées dans la littérature (p. ex. isométrie rotation externe/interne à 0° et 90°, endurance scapulaire en prone T/Y, CKCUEST, seated shot-put, S-STARTS composite) sont utiles pour repérer des déficits résiduels susceptibles d’être corrigés en rééducation. Mais gardez à l’esprit : la plupart des tests manquent encore de cut-offs validés spécifiquement pour la prédiction du RTSP.
- Détection précoce des déficits (force, endurance scapulaire, kinetic chain) et ciblage systématique en rééducation.
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Intégration progressive des tâches sport-spécifiques (workouts techniques, contact training) dans un continuum mesuré par les tests.
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Planifier des réévaluations à 3, 6 et 9 mois (ou selon sport) pour identifier les besoins de réhab additionnelle avant et après la reprise.