Facteurs associés aux douleurs de hanche et à l’aine chez de jeunes footballeurs d’élite : une étude de cohorte

Mar 8 / Victor OSWALD
La hanche et l’aine sont considérés comme la 4ème localisation la plus fréquente de blessures chez les jeunes footballeurs d’élite. Une étude transversale récente a signalé que 42% des jeunes footballeurs d’élite ont signalé des symptômes de pubalgie au cours de la saison précédente, indépendamment du temps d’arrêt. Pour prévenir ces blessures dans cette population, il est nécessaire d’identifier les facteurs de risque modifiables pour permettre le développement de programmes de prévention.

A l’heure actuelle, la seule étude prospective menée auprès de jeunes footballeurs d’élite a révélé que ceux dont la maturité squelettique était précoce avaient plus de risque de pubalgie que ceux dont la maturité était plus tardive. La maturité squelettique étant un facteur de risque non-modifiable, il est nécessaire de mener des recherches supplémentaires sur les facteurs de risque modifiables.
Une force plus faible des adducteurs de hanche a été identifiée comme un facteur de risque intrinsèque de douleur de hanche ou à l’aine chez les footballeurs adultes. La force des adducteurs lors des tests de présaison est jusqu’à 5.4 % plus faible chez les joueurs souffrant de pubalgie alors que des niveaux de force plus élevés ont été identifiés comme protecteurs. De plus, des ratios de force adducteurs/abducteurs significativement plus faibles, avec une valeur seuil de 80%, ont été identifiés chez les footballeurs adultes souffrant de pubalgie. Bien que des tests de force des adducteurs et du ratio de force adducteurs/abducteurs soient utilisés comme outils de détection précoce de pubalgie chez les jeunes footballeurs d’élite, il n’est pas clair si les tests de présaison peuvent être prédictifs de pubalgie en cours de saison.

Le Copenhagen Hip And Groin Outcome Score (HAGOS) est un questionnaire d’auto-évaluation (PROM) valide et fiable pour évaluer la santé de la hanche et de l’aine chez des athlètes d’âge jeune à moyen et son utilisation est recommandée dans des cohortes de footballeurs. Il a été démontré que le questionnaire HAGOS permet de distinguer les joueurs de football souffrant ou non de pubalgie et d’identifier les joueurs à risque. Des scores inférieurs en présaison sont associés à un risque accru de blessures de la hanche et de l’aine en cours de saison chez les footballeurs d’élite adultes masculins. Cependant, aucune étude n’a examiné cette relation dans une population de jeunes footballeurs.

Les objectifs de cette étude étaient donc d’identifier si la force des adducteurs et des abducteurs de hanche et les scores au questionnaire HAGOS en présaison chez de jeunes footballeurs et footballeuses d’élite sont 

  • Prédictifs de douleurs de hanche et à l’aine pendant la saison
  • Associés aux antécédents de douleurs de hanche et à l’aine, que la douleur ait entraîné ou non un temps d’arrêt

Méthode

Conception de l’étude 

  • Etude de cohorte menée sur des footballeurs d’élite (total : n=111 ; garçons : n=63 ; filles : n = 48) recrutés dans un seul club : Newcastle Jets A-League FC Academy à Newcastle (Australie). 


  • La collecte des données de présaison a eu lieu en octobre 2018, comprenant le questionnaire HAGOS, les antécédents de blessures à la hanche et à l’aine et des tests de force musculaire des adducteurs et abducteurs de hanche.


  • Le suivi en cours de saison de tous les épisodes de douleur à la hanche ou à l’aine (que la douleur ait entraîné un temps d’arrêt ou non) a été collecté pendant les 10 mois de la saison, de novembre 2018 à août 2019.

  • Les douleurs de hanche et à l’aine ont été définies comme des douleurs à la partie antérieure de la hanche, la région pubienne, la région inguinale et l’insertion proximale des adducteurs (excluant les parties latérale et postérieure de hanche).

Questionnaire HAGOS de présaison 

Tous les participants ont rempli le questionnaire HAGOS comprenant 37 questions regroupées en 6 sous-échelles : douleur, symptômes, activités de la vie quotidienne, activités sportives et récréatives, pratique d’activité physique et qualité de vie. Chaque échelle a été notée indépendamment puis normalisée sur une échelle sur 100, les scores les plus bas indiquant des problèmes plus importants. 

Tests de force de présaison 

La force des adducteurs (A) et abducteurs (B) de hanche a été enregistrée à l’aide d’un dynamomètre manuel (HHD). Un « break » test, défini comme une contraction musculaire excentrique a été utilisé pour déterminer la force maximale des participants, car il s’est avéré plus sensible pour identifier les footballeurs souffrant de pubalgies liées aux adducteurs que les tests isométriques. 
La valeur la plus élevée des 3 répétitions du test a été utilisée pour l’analyse, sauf si la valeur la plus élevée était supérieure à 10% des deux autres valeurs. Dans ce cas, la valeur la plus élevée était considérée comme aberrante et la 2ème valeur la plus élevée était retenue. Si une répétition était douloureuse, le test était arrêté et cette valeur exclue des analyses.

  • La force des adducteurs et abducteurs a été mesurée en Newtons (N)
  • Le couple de force a été calculé en multipliant la valeur de force la plus élevée retenue par la longueur du membre inférieur en mètres (mesurée de la malléole latérale au grand trochanter) puis divisée par la masse corporelle en kilogrammes.
  • Le rapport entre la force excentrique des adducteurs et celle des abducteurs a été calculé pour chaque côté
  • La différence entre les 2 côtés a été calculée en soustrayant le côté dominant au côté non-dominant pour les valeurs de force (N) et de couple de force (N/Kg)

Suivi en cours de saison 

Il a été conseillé aux joueurs et aux entraîneurs de signaler toute douleur ou blessure au personnel médical, lors des matchs ou des entraînements, qu’un traitement soit nécessaire ou non. Ainsi, les douleurs de hanche et à l’aine, avec ou sans temps d’arrêt, ont été enregistrées chaque semaine et les joueurs examinés par un kinésithérapeute qui a établi un diagnostique clinique. 

Résultats

Participants

Sur les 111 joueurs, 106 ont accepté de participer à l’étude (garçons : n = 59 ; filles : n = 47). 1 joueur masculin a été exclu car aucune donnée de force n’a été enregistrée, ce qui fait que 105 joueurs ont été inclus dans l’analyse (âge moyen de la cohorte : 12,7 ± 1,0 ans ; garçons : 12,5 ± 1,1 ; filles : 12,9 ± 0,8). 

 Prévalence des douleurs de hanche et à l’aine
 

  • 23 joueurs (21.9%) ont signalé au moins un épisode de douleur de hanche et/ou à l’aine, avec ou sans temps d’arrêt, en cours de saison (18 garçons, 5 filles) 
  • 18 joueurs (17.1%) ont ressenti des douleurs entraînant un arrêt (14 garçons, 4 filles) tandis que 5 (4.8%) ont ressenti des douleurs sans temps d’arrêt. 
  • Parmi les 23 joueurs ayant signalé des douleurs à la hanche et/ou à l’aine, 30.4% ont connu plus d’un épisode (7 garçons, 0 fille)
  • La prévalence des antécédents auto-rapportés de douleurs de la hanche et à l’aine était de 18.1% (13 garçons et 6 filles) 
  • Tous les joueurs ayant déclaré des antécédents de douleurs de la hanche et/ou à l’aine ont également connu au moins un épisode en cours de saison
  • Le diagnostic clinique a déterminé que :

     5 joueurs avaient des blessures liées aux adducteurs (4 garçons, 2 filles)
     11 joueurs avaient des blessures liées au psoas (9 garçons, 2 filles)
     7 joueurs avaient des blessures mixtes ou non spécifiques (5 garçons, 2 filles)

 Tests de présaison associées aux douleurs de hanche et à l’aine
 

  • Les joueurs (garçons) qui ont développé des douleurs en cours de saison avaient un IMC significativement plus élevé