Altérations de l’activité corticale chez des joueurs de football avec instabilité chronique de cheville pendant un drop jump landing : une étude préliminaire

Sep 6 / Nicolas Campet
L’entorse de la cheville est la blessure la plus commune du membre inférieur, comptant pour 9,4% à 18% de toutes les blessures sportives. 73% des individus qui ont subi une entorse de cheville décrivent des symptômes résiduels, parmi lesquels l’instabilité chronique (CAI) apparait comme la séquelle la plus fréquente. Elle se manifeste par des entorses à répétition, des douleurs persistantes, une sensation d’instabilité et une altération de la fonction de la cheville. La littérature montre que dans la première année post-entorse, 40% des patients ont développé une CAI, menant chez un tiers d’entre eux à l’arrêt de l’exercice.
Lors de la pratique du football, l’articulation de la cheville est soumise à un stress important dû aux changements posturaux soudains, aux arrêts, aux sauts et aux tacles.
Ainsi la lutte pour le ballon peut amener à des situations d’éversion ou d’inversion rotation de la cheville, augmentant le risque d’entorse, ce qui a pour conséquence d’altérer non seulement la performance athlétique mais également d’augmenter le risque d’usure articulaire et d’arthrose prématurée.
La prévalence de l’arthrose de cheville étant plus importante chez ces joueurs, en particulier ceux qui sont sujets à la CAI, il apparait important de comprendre parfaitement le mécanisme d’instabilité chronique dans cette population, et ce afin de pouvoir mettre en place une stratégie de réhabilitation et de prévention efficace.
Avis du pôle scientifique de Kinesport
Pastille orange
Cette étude préliminaire et rétrospective est un article à risque de biais modéré. Une étude préliminaire est une première étude faite à amont d’une étude à grande échelle pour observer la tendance des résultats sur un faible échantillon. Ce type d’étude permet d’élaborer des hypothèses de résultats pour l’étude à grande échelle qui suivra. Les critères méthodologiques importants de cette étude préliminaire ont été respectés. Cependant, même si l’estimation de la taille d’échantillon a été calculée, elle n’a pas pu être respectée dans le groupe contrôle en raison des conditions sanitaires liées à la pandémie de Covid. Par conséquent, les résultats sont vraiment à prendre avec précautions, comme des hypothèses préliminaires, qu’il faudra confirmer avec des études à plus grande échelle.
Malgré l’évolution de certaines théories, il n’existe actuellement toujours aucun consensus sur le mécanisme de cette pathologie. Les modèles les plus traditionnels sont orientés vers une problématique davantage périphérique que cérébrale tandis que de récents travaux montrent que des changements dans le système nerveux central (SNC) sont bien présents chez ces patients instables chroniques, par exemple au niveau du cortex moteur ou du cortex somato-sensoriel. L'intégration sensorimotrice altérée à travers des réseaux neuronaux complexes contribuerait au développement de la CAI, par l’intermédiaire d’afférences ligamentaires et d’un sens proprioceptif déficient.
Grâce aux travaux effectués sur le genou, et notamment sur le LCA, l’utilisation de l’électroencéphalographie (EEG) a permis de lever le voile sur ces modifications corticales et cette réorganisation du SNC. Malheureusement la littérature est manquante sur les modifications cérébrales observées chez les patients en instabilité chronique ou fonctionnelle de cheville, surtout chez les athlètes.
L’objectif de cette étude est donc d’analyser les caractéristiques de l’activation corticale de joueurs de football CAI pendant une tâche de drop jump landing, l’hypothèse étant que ce mouvement constitue un challenge plus important pour ces sportifs et donc qu’il occasionne une plus grande activation corticale que chez des participants témoins en bonne santé.

Méthodes

 Design d’étude

Dans le but d’examiner les caractéristiques de l’activation centrale dans une population CAI, le design de cette étude se présente sous la forme GROUPES (CAI vs CONTROLE) X JAMBES (BLESSÉE vs SAINE).
Tous les tests ont donc été réalisé à la fois sur la jambe saine et la jambe blessée, et des comparaisons ont été faites entre les groupes et les jambes.

 Participants

Un total de 24 volontaires a été inclus dans l’analyse et il n’existait aucune différence démographique à l’exception du CAIT Score, utilisé pour évaluer la sévérité de l’instabilité fonctionnelle de la cheville. 
Les critères d’inclusion pour les participants CAI étaient les suivants : 
  • Être un joueur de football (soccer) universitaire
  • Être âgé entre 18 et 24 ans
  • L’atteinte doit être unilatérale
  • Un antécédent d’au moins une entorse latérale de cheville significative, avec symptômes inflammatoires et arrêt du sport
  • L’entorse initiale et l’atteinte la plus récente devait avoir eu lieu respectivement plus de 12 mois et 3 mois avant l’étude. 
  • Un historique d’au moins deux épisodes de « torsion » et/ou entorse récidivante et/ou sensations d’instabilité dans les 6 mois avant l’étude
  • Un score CAIT ≤ 24
Les critères d’inclusion pour les patients contrôle étaient les suivants : 
  • Être un joueur de football (soccer) universitaire
  • Être âgé entre 18 et 24 ans
  • Aucun antécédent d’entorse de cheville
  • Un score CAIT ≥ 28
Les volontaires étaient exclus si : 
  • Ils avaient eu recours à une chirurgie ou avaient subi une fracture
  • Ils avaient une blessure aigue sur des structures musculo squelettiques d’autres articulations du membre inférieur dans les 3 mois précédents l’étude
  • Ils avaient des antécédents de troubles vestibulaires ou d’équilibre
  • Ils avaient n’importe quel problème de santé qui affectaient leurs capacités d’équilibre
  • Ils avaient un Talar tilt test et/ou un Anterior ankle drawer test positif

 Protocole du test d’électroencéphalographie (EEG)