Différences d’activations des muscles du tronc pendant les exercices de planche avec sangles de suspension.

Kinesport
Ces dernières années, l'importance de la stabilité et de la force du tronc est largement reconnue dans la rééducation et l'entraînement sportif. Les muscles du tronc contribuent à la chaîne cinétique fonctionnelle, au maintien de la colonne vertébrale et transfèrent la puissance aux membres durant les activités physiques. Dans le domaine de la rééducation, les exercices de renforcement du tronc peuvent réduire le risque de blessures en augmentant la puissance et l'endurance musculaire, et également avoir un impact important dans la gestuelle du sportif et la prévention des blessures. Des études ultérieures ont démontré que la réalisation d'exercices isométriques sur plan instable (swiss ball, BOSU, sangles, etc…) augmente l’activité musculaire des muscles stabilisateurs du tronc. Cependant, la recherche sur l'activité musculaire pendant différents exercices isométriques est limitée. Par conséquent, Luk et al. (2021) ont comparé l'activation neuromusculaire de certains muscles du tronc lors d'exercices de pont fessier et de planche ventrale dans des conditions stables et instables.

Matériel et Méthodes :

1. Approche expérimentale du problème

Six conditions ont été installées :

  1. Pronecon : Planche ventrale, les deux bras et les pieds sur le sol.
  2. Supinecon : Planche dorsale, les deux bras et les pieds sur le sol.
  3. Prone-Feetsuspension : Planche ventrale, les bras sur le sol et pieds en suspension.
  4. Supine-Feetsuspension : Planche dorsale, les bras sur le sol et pieds en suspension.
  5. Prone-Armsuspension : Planche ventrale, les bras en suspension et pieds sur le sol.
  6. Supine-Armsuspension : Planche dorsale, les bras en suspension et pieds sur le sol.

Au cours de tous les exercices, les auteurs ont mesuré l’activité électromyographique de surface (sEMG) des muscles suivants :

  • Droit de l’abdomen (RA)
  • Multifidus lombaire (LM)
  • Erector spinae thoracique (TES)
  • Rectus femoris (RF)
  • Gluteus maximus (GM)
  • Biceps femoris (BF)

Les données EMG ont été normalisées par rapport aux valeurs de la contraction volontaire maximale (MVC) avant d'être utilisées pour la comparaison entre les différentes conditions d'exercice.

2. Participants

43 sujets masculins en bonne santé (âge moyen : 21,4 ans) ont participé à cette étude. Les critères d'inclusion étaient les suivants : 

  • Pas d'antécédents de douleurs lombaires pendant plus de 6 semaines avant l'étude
  • Pas de chirurgie ou de traumatisme de la zone abdominale/dorsale nécessitant des points de suture au cours des 12 derniers mois
  • Pas de douleur lombo-pelvienne pendant un test actif d'élévation de la jambe droite
  • Pas de douleur ou de gêne musculaire lors de l'exécution des exercices sélectionnés
  • Avoir une expérience ou des antécédents d'entraînement avec un système de suspension
  • Avoir une mesure du pli cutané abdominal inférieure à 25 mm et un taux de masse grasse inférieur à 24%


3. Procédures :

Chaque variation d’exercice était maintenue en contraction isométrique de 30 secondes et était répétée deux fois avec un intervalle de repos de 5 min. Le système de suspension utilisé était de la marque TRX.

Figure 1 à gauche : Exercices en planche ventrale a) Pronecon b) Prone-Armsuspension c) Pronefeetsuspension
Figure  2à droite  : Exercices en planche dorsale 
a) SupineCon b) Supine-Armsuspension c) Supinefeetsuspension

Résultats :


Planche ventrale :

  • La Prone-Armsuspension a donné lieu à des activités significativement plus élevées des muscles RA, RF, TES, et LM par rapport à la Prone-Feetsuspension (p < 0,010) et Pronecon (p < 0,001).
  • La Prone-Feetsuspension a produit des activités significativement plus élevées des muscles RA, RF, TES, et LM par rapport à la Pronecon (p < 0.001).
  • Les activations des muscles GM et BF pendant la Prone-Armsuspension étaient significativement plus importantes que celles pendant la Pronecon (p < 0,010).

Planche dorsale :

  • L'activité musculaire des muscles RA, RF, TES, LM et BF était plus élevée dans le cas de la Supination-Feetsuspension que dans celui de la Supination-Armsuspension (p < 0,010) et du Supinecon (p < 0,001).
  • Les activations du RF, du TES et du BF étaient également significativement plus élevées pendant le Supine-Armsuspension par rapport au Supinecon (p < 0,010).
  • Le Supine-Feetsuspension a provoqué une activité musculaire significativement plus faible pour le GM en comparaison avec le Supine-Armsuspension (p < 0.001) et le Supinecon (p < 0.001).

Discussion :


Cette étude visait à comparer les différentes activations neuromusculaires des muscles sélectionnés lors d'exercices de planche en décubitus dorsal et ventral dans des conditions stables et instables (c'est-à-dire avec un système de suspension). Les résultats de cette étude ont indiqué que l'instabilité fournie par le système de suspension (TRX) augmentait les niveaux d'activation musculaire, telles que le RA, le LM, le TES, le RF et le BF, pendant les exercices statiques, tels que la planche en décubitus dorsal et ventral. Cette étude est la première à montrer que l'utilisation de l'entraînement par suspension augmente l'activation musculaire par rapport aux exercices conventionnels sur une surface stable. Selon ces  résultats ainsi que ceux des études antérieures, les exercices de planche ventrale ne devraient pas être considérés comme un entraînement efficace pour le TES, le LM, le GM et le BF en raison du faible niveau d'activation de ces muscles. Les résultats actuels ont montré que les activités musculaires les plus élevées du droit de l’abdomen et du droit fémoral ont été trouvées en Prone-Armsuspension. Des études antérieures ont indiqué une augmentation de 33% de l'activation du muscle droit de l’abdomen lorsque les pieds étaient suspendus au TRX. Dans les exercices de planche en décubitus dorsal, les muscles antérieurs (RA et RF) sont restés à un niveau d'activation faible, alors que leurs activités musculaires étaient significativement plus élevées dans l'exercice Supine-Feetsuspension. L'ajout des composants déstabilisants pourrait augmenter la perturbation du tronc.

Le maintien de la position du corps en planche dorsale avec les pieds en suspension exigeait une flexion intense et soutenue du genou, ce qui justifie le niveau d'activation très élevé du biceps fémoral dans cette étude. Par conséquent, l’exercice de pont fessier avec pieds sur TRX est une bonne option par rapport à un pont fessier sur plan stable pour obtenir un niveau élevé d'activitation des muscles LM et TES et un niveau très élevé d'activité du biceps fémoral.

Conclusion

Complexifier les exercices de planche ventrale ou de pont fessier avec un système de suspension (TRX) peut permettre d’augmenter l’activation des muscles impliqués, notamment le droit de l’abdomen, ou le biceps fémoral. Ce type d’exercice est idéal pour les athlètes afin d'améliorer les exercices de renforcement sur une base d'appui instable. L'instabilité produite par la suspension pourrait également être utilisée pour entraîner les muscles stabilisateurs du tronc, et sa spécificité pourrait imiter efficacement les contraintes de certains sports tels que la natation.

L'article

Luk,J.T.C.;Kwok,F.K.C.; Ho, I.M.K.; Wong, D.P. Acute Responses of Core Muscle Activity during Bridge Exercises on the Floor vs. the Suspension System. Int. J. Environ. Res. Public Health 2021, 18, 5908. https://doi.org/10.3390/ ijerph18115908