Prise en charge de la tendinopathie rotulienne : Revue systématique et méta-analyse des études randomisées

Mar 15 / JOSÉ JUDEZ RUIZ
La tendinopathie rotulienne est décrite comme une douleur persistante et un dysfonctionnement du tendon rotulien liés à une charge mécanique. Il survient généralement comme réponse à une surutilisation et c´est une pathologie multifactorielle complexe. La tendinopathie est plus fréquente chez les athlètes qui participent à des sports qui impliquent une charge répétitive sur le tendon, comme le basket-ball et le volley-ball. Dans tous les sports, jusqu'à 22 % des athlètes d'élite signalent une douleur au tendon rotulien à un moment donné de leur carrière. Le diagnostic de la tendinopathie rotulienne est clinique, le patient décrivant souvent une activité douloureuse et des raideurs tendineuses localisées. Dans les premiers stades, un individu peut souvent continuer l'activité. Cependant, la douleur peut progresser, entraînant une altération chronique d'une durée moyenne de 32 mois.
La prise en charge de la tendinopathie peut être divisée en modalités actives et passives. Les stratégies actives impliquent particulièrement de travail de charge sur le tendon, le travail excentrique a été le plus populaire avec des pourcentages de réussite de 50% à 70% avec des suivis de 3 à 6 mois. 
Récemment, les exercices isométriques et à résistance lente et lourde (HSR) se sont avérés efficaces pour réduire la douleur et améliorer la fonction dans la tendinopathie rotulienne. Il existe une multitude de traitements passifs [médicaments anti-inflammatoires, des injections de corticostéroïdes et de plasma riche en plaquettes (PRP), l'iontophorèse, le trinitrate de glycérol (GTN), la thérapie par ondes de choc extracorporelle (ESWT)], la thérapie laser à basse énergie et les ultrasons thérapeutiques (US). Une intervention chirurgicale peut être envisagée en cas d´échec des traitements conservateurs. Les auteurs ont cherché à résumer les preuves disponibles sur la gestion de la tendinopathie rotulienne.

Méthodes

La présente revue systématique a été menée et rédigée conformément aux directives PRISMA-NMA (Preferred Reporting Items for Systematic Reviews and Meta-Analyses–NMA). Sur des patients atteints de  tendinopathie rotulienne, avec toutes modalités des traitements (même un placebo) et avec des scores de douleur et fonction (EVA et VISA-P).

Inclusion

  • Études randomisées comparant différentes modalités de traitement pour la tendinopathie rotulienne. 
  • Avec participants de plus de 18 ans. 

Exclusion

Études comparatives non randomisées, études des cas, études observationnelles ou les revues de la littérature. Les études publiées dans des autres langues que l´anglais ont été exclues. 

Stratégie de recherche

La recherche des études randomisées a été menée aux moteurs de recherche Medline, EMBASE, Scopus, CENTRAL et CINAHL en mai 2021. Les articles de revue pertinente ont été sélectionnés pour identifier les articles éligibles avec un filtrage des références bibliographiques sur Google Scholar. Sur un total de 7913 articles initialement identifiés, après exclusion, sélection du titre et du résumé et ajout des études manquées identifiées par la suite, 37 études se sont avérées remplir les critères d'éligibilité.

 Risque de biais – Evaluation des niveaux des évidences 

La validité interne (absence de biais) de chaque étude incluse a été évaluée à l'aide de l'outil de la ‘Cochrane Collaboration’s tool for assessing the risk of bias in randomised trials’ par les deux examinateurs et par un troisième examinateur indépendant dans les cas de désaccord. Les études ont été caractérisées comme présentant un risque global de biais « faible », « élevé » ou « pas clair ». La force des preuves a été évaluée avec l'outil GRADE, où les résultats de deux études ou plus ont été regroupés dans des méta-analyses par paires et avec l'outil GRADE-NMA pour les NMA (niveaux maximaux accessibles). La signification clinique a été définie comme une différence minimale de 1,5 points dans l'EVA de la douleur et de 13 points dans le VISA-P entre les interventions comparées et ces seuils ont également été utilisés comme différence cliniquement pertinente minimale (MCRD) dans le cadre de l'évaluation du risque « d'imprécision » de l’outil GRADE.

Extraction des donnés

Les résultats ont été divisés en court terme (suivi ≤12 semaines), moyen terme (suivi >12 semaines–suivi ≤12 mois) et long terme (suivi >12 mois). Les comparaisons d'interventions rapportées par deux études ou plus à des moments de suivis similaires ont été regroupées quantitativement par des méta-analyses par paires en l'absence d'hétérogénéité clinique significative. Les différences moyennes brutes (DM) avec leur IC à 95 % qui les accompagnent ont été calculées et utilisées dans les tests, car les outils utilisés dans les études étaient les mêmes. Enfin, une NMA a été réalisée pour les deux mesures de résultats (EVA de la douleur et VISA-P) à chaque période de suivi où des données adéquates existaient.

Résultats

Un total de 37 essais contrôlés randomisés (ECR) ont été jugés éligibles, incluant 1332 patients (1407 tendons) atteints de tendinopathie rotulienne (âge moyen 29,2 ans). La majorité des patients présentaient une tendinopathie chronique (> 3 mois) et la durée moyenne des symptômes, était de 25,7 mois (intervalle de 1 à 120 mois). Les études incluses ont évaluées, 33 interventions qui ont été appliquées seules ou en combinaison avec d'autres interventions. Le suivi de temps les plus fréquents étaient de 12 et 24 à 26 semaines. Toutes les études incluant la douleur comme critère de jugement (sauf 5 études) ; 31 études utilisaient une échelle numérique de 0 à 10 ou 0 à 100 (« EVA » ou « échelle d'évaluation numérique ») et 1 une échelle catégorielle non numérique. VISA-P a été utilisé dans 30 études. Quinze études ont été considérées avec un risque de biais faible et 22 avec un risque global de biais élevé. Les conclusions des résultats regroupés des données méta-analysées sont présentées ci-dessous.

ESWT + exercice excentrique versus placebo ESWT + exercice excentrique

Deux ECR (l'un à risque élevé et l'autre à risque faible de biais) ont évalué l'efficacité de l'ESWT + exercice excentrique par rapport à l'ESWT simulé + exercice excentrique pour la tendinopathie rotulienne lors d'un suivi à court terme (12 semaines). Le résultat combiné des deux études n'a démontré aucune différence statistiquement ou cliniquement significative pour l'EVA de la douleur (DM +0,1 point d'EVA en faveur du groupe ESWT fictif, IC à 95 % (−0,8 à 1), p=0,84, I 2 =0 %) ou VISA-P (DM -1,8 points VISA-P en faveur de l'ESWT fictif (-8 à 4,4), p = 0,57, I 2 = 0 %). L'ESWT + exercice excentrique ne semble pas plus efficace que l'exercice fictif ESWT + excentrique pour la douleur ou les résultats fonctionnels sur la base de preuves de force modérée.

Exercice isométrique versus exercice isotonique