Suivre cette abondance de recherche pose un défi pour la plupart des cliniciens. Il n'est pas surprenant que le transfert des résultats de la recherche dans la pratique soit souvent décrit comme lent, aléatoire et imprévisible. Par ailleurs, les quelques habiletés documentaires acquises, souvent de manière personnelle, ne semblent pas permettre la mise en place de la démarche méthodique nécessaire à l’élaboration de cette démarche de recherche, fût-elle une initiation. Quelques pays, mais très peu dans le monde ont organisé des évaluations des pratiques vis-à-vis de ce modèle EBP. Nous avons décidé de mener une recherche des publications par questionnaires auprès des physiothérapeutes sur Pubmed sur la période de 2020 à 2015 afin de découvrir les tendances principales des cinq dernières années. Parmi nos critères d’exclusion figurent les études pathologies-centrées et ceux d’inclusion, figurent les pratiques et contraintes-centrées.
Colombie

Systematic review et scoping
Le manque de temps, l’incapacité à comprendre les statistiques, manque de soutien, manque de ressources, manque d'intérêt et manque de généralisation des résultats
La même année, 2015, Condon et al. publient une scoping review sur la pratique de l’EBP relevé par questionnaires par les physiothérapeutes de 2009 à 2013. Ils constatent qu’il existe peu de preuves démontrant que les physiothérapeutes entreprennent le processus complet d’EBP. Malgré la formulation de questions cliniques et l'acquisition de preuves basées sur la littérature, les motivations pour effectuer des recherches de littérature ou de preuves n'étaient pas clarifiées. Les physiothérapeutes ont déclaré utiliser leurs pairs et d'autres sources fiables de préférence à la littérature, principalement en raison du temps mais aussi de la divergence entre les preuves basées sur la littérature et d'autres preuves qu'ils utilisent et valorisent (connaissances tacites). L'impact positif de l’EBP sur les résultats des patients faisait défaut.
Indes
Perraton et al. (2017) face à ces contraintes relevées expliquent qu’il est essentiel d'aider les physiothérapeutes en Indes à appliquer les résultats de la recherche à la pratique clinique pour garantir la qualité de la pratique. En effet, en se servant de publications antérieures sur l’application du modèle EBP par les physiothérapeutes du pays et de l’harmonie de son enseignement, ils ont constaté des résultats très hétérogènes. Le manque de temps du clinicien, l'accès à la littérature et la compétence en matière d'évaluation critique sont les obstacles qui ont été identifiés. Il a également été question des obstacles à l'enseignement de la pratique fondée sur des données probantes (manque de compétences en matière d'évaluation critique de la part du corps enseignant universitaire et clinique, du manque de preuves de haute qualité dans la littérature pour répondre aux questions cliniques et de la résistance à la modification des méthodes d'enseignement). Face à cela, ils proposent un document qui rend compte des comportements à long terme prévus et réels des étudiants en physiothérapie qui ont suivi un programme de formation intensive à la pratique fondée sur des données probantes dans le cadre d'un programme de cours de troisième cycle. Après avoir suivi un cours intensif de 3 semaines sur les méthodes de recherche quantitative en santé et EBP. À l'issue du cours, les étudiants ont été interrogés sur leur intention d'utiliser des données probantes pour éclairer leur future pratique clinique. L’enquête en ligne a été utilisée pour évaluer les comportements des diplômés en matière d'EBP. Sur un total possible de 202 étudiants, les coordonnées de 193 étudiants ont été obtenues, et 65 étudiants ont répondu à l'enquête (taux de réponse de 34 %). À la fin du cours, 174 étudiants (86 %) ont indiqué qu'ils avaient l'intention d'utiliser la recherche pour guider leurs décisions cliniques au moins une fois par semaine. Lors du suivi, la plupart des diplômés ont déclaré utiliser fréquemment la recherche pour éclairer leur pratique clinique, ce qui est indiqué par une note moyenne de 6,5 (±1,9) dans une fourchette possible de 0 (pas du tout) à 10 (tout le temps). En moyenne, les étudiants ont déclaré passer 2,2 (±2,2) heures par semaine à consulter et à lire des données de recherche. Les obstacles les plus courants à la mise en œuvre des données probantes étaient le manque de temps, l'accès limité aux sources de données probantes et le manque perçu de généralisation des résultats de recherche à des groupes de patients spécifiques. Les auteurs concluent que les diplômés d'un programme de formation intensive à l’EBP ont régulièrement mis en œuvre le modèle dans leur pratique clinique.
Le manque de compétences en matière d'évaluation critique de la part du corps enseignant universitaire et clinique, du manque de preuves de haute qualité dans la littérature pour répondre aux questions cliniques et de la résistance à la modification des méthodes d'enseignement sont des obstacles à l'enseignement de la pratique fondée sur des données probantes
Malaisie
De manière chronologique, c’est au tour de Yahui et al. (2017) d'identifier par questionnaire auprès de 102 physiothérapeuthes de Malaisie, leurs connaissances, attitudes et les obstacles à la mise en œuvre de l’EBP. Les personnes interrogées ont reconnu que l’EBP est nécessaire à la pratique et qu'elle aide à la prise de décision ainsi qu'à l'amélioration des soins aux patients. 81% des personnes interrogées étaient d'accord ou tout à fait d'accord pour dire qu'elles avaient reçu une formation officielle en matière d’EBP. Cependant, 61% des personnes interrogées ont déclaré qu'ils manquaient des preuves solides pour soutenir leurs interventions. 30% des répondants ont déclaré lire <2 articles par mois, avec 57% déclarant lire deux à cinq articles au cours d'un mois typique. Cette étude a également révélé que les contraintes de temps, l'accès limité aux moteurs de recherche et le manque de généralisation des résultats de recherche sont les trois principaux obstacles à la mise en œuvre de l’EBP. Les auteurs concluent que les physiothérapeutes de Malaisie ont une attitude positive à l'égard de l’EBP et sont enclins à mettre en œuvre des preuves dans leur pratique clinique. Ils souhaitent suivre des cours pour améliorer leurs connaissances et leurs compétences en matière d’EBP.

Arabie saoudite
Alshehri et al. (2017) emboîtent le pas pour l’Arabie Saoudite avec 14 questions auprès de 376 physiothérapeutes. Bien que la plupart des physiothérapeutes aient déclaré avoir une attitude positive à l'égard de l'utilisation de la recherche dans la pratique, beaucoup d'entre eux ne connaissaient pas les conditions et la mise en œuvre de l’EBP. La majorité des physiothérapeutes n'avaient pas de formation officielle en matière d’EBP (70,2 %) dans les universités ou dans des centres de formation autorisés. Selon les réponses recueillies, l'obstacle le plus important à la mise en œuvre de l'EBP était l'insuffisance de l'enseignement (43,1 %), suivi par le manque de connaissances et de compétences en matière de recherche (36,4 %). L'étude a révélé qu'il existait une association significative entre l'attitude des physiothérapeutes et leur niveau d'éducation, alors qu'aucune association significative n'a été identifiée sur la base d'autres données démographiques. En outre, il y avait des associations significatives entre la sensibilisation et les connaissances des physiothérapeutes et des données démographiques telles que le niveau d'éducation, le cadre de travail, le titre du poste et la formation antérieure en matière d’EBP. Il existe donc un écart important en termes de compréhension et d'application du modèle EBP chez les physiothérapeutes en Arabie Saoudite.
Equateur
Népal
Italie
Castellini et al. (2020), dernière étude en date recensée, copient-collent le fonctionnement pour l’Italie. Nous vous proposons de l’étudier plus en détails. L'objectif était d'examiner la connaissance, l'utilisation, les attitudes et les obstacles perçus de l’EBP. Les objectifs secondaires étaient d'étudier et d’analyser l'écart entre la connaissance perçue et réelle des principes de l’EBP chez les physiothérapeutes. Pour cette étude transversale, les auteurs ont mené une enquête auprès de 2000 membres actifs de l'Association italienne des physiothérapeutes (Associazione Italiana Fisioterapisti (AIFI)). L'âge médian des répondants était de 35 ans, et 52 % étaient des femmes. Environ 60 % des répondants travaillaient dans un cabinet privé et 27 % dans un hôpital. Au total, 1111 personnes ont répondu à la question portant sur la connaissance des principes de l'EBP. La majorité (85 %) ont déclaré connaître le modèle EBP. Les canaux les plus fréquents pour apprendre les principes de l'EBP étaient les conférences/réunions (48%), les cours d'apprentissage à distance et en présentiel (35%) et les cours de formation professionnelle continue avancée (35%). Seuls 23 % des répondants ont déclaré avoir appris les principes de l’EBP au cours de leurs études de premier cycle. En ce qui concerne les sources que les physiothérapeutes consultent pour résoudre les problèmes cliniques, la majorité des répondants ont déclaré que leurs canaux d'information préférés étaient la discussion avec les pairs (80 %) et la recherche documentaire (86 %). 30 % ont déclaré qu'ils se fiaient à leur propre expérience. En outre, 78 % ont déclaré qu'ils se sentaient compétents pour appliquer l’EBP, tandis que 1,2 % ont déclaré qu'ils se sentaient complètement incapables. Plus de la moitié (61 %) se sont déclarés confiants dans leur capacité à évaluer de manière critique la qualité de la conception des études et de l'analyse statistique. Cependant, beaucoup ont déclaré qu'ils ne comprenaient pas la signification des termes "ECR - RCTs" (72 %), " statistical significance’ " (65 %) et "méta-analysis" (52 %), mais peu ont pu expliquer les termes " forest plot’ " (17 %) et " confidence intervals’ " (38 %). En outre, si 82 % ont correctement identifié le meilleur design d'étude pour évaluer une intervention, seuls 20 % ont pu identifier le résultat de l'estimation globale d'une méta-analyse donnée. Une écrasante majorité de répondants (90 %) a reconnu que l’EBP est utile, complète et efficace, ce qui démontre une attitude globalement positive envers son utilisation. Mais si 90 % savent que la littérature scientifique fait partie du modèle, de nombreuses personnes interrogées ne considèrent pas le rôle du souhait des patients (56 %) et de l'expertise clinique (39 %) comme faisant partie du processus. Au cours d'un mois typique, 59 % des personnesinterrogées ont déclaré avoir lu entre un et cinq articles et seulement 9 % ont déclaré ne pas l'avoir fait. En outre, 55 % ont déclaré qu'ils prenaient des décisions cliniques sur la base de leurs lectures scientifiques, 80 % ont exprimé le besoin d'accroître leur utilisation de l’EBP et 69 % ont déclaré que cela serait bénéfique pour leur carrière. En ce qui concerne la question du questionnaire sur les valeurs des patients dans le cadre du modèle EBP, les jeunes physiothérapeutes (âge <29 ans) semblaient plus conscients de la valeur des patients dans le modèle que leurs homologues plus âgés (âge >49 ans). Les physiothérapeutes qui travaillent en cabinets étaient moins susceptibles de déclarer qu'ils comprenaient le modèle que ceux qui travaillent dans un autre cadre. En revanche, les répondants travaillant dans la recherche et dans l'enseignement étaient plus susceptibles de reconnaître la valeur du patient dans le cadre du modèle EBP, et les répondants titulaires d'une maîtrise en sciences étaient deux fois plus susceptibles de la reconnaître que ceux qui n'avaient pas de maîtrise en sciences. La même différence a été observée pour les répondants ayant un diplôme universitaire supérieur. En ce qui concerne les items du questionnaire sur l'expertise clinique dans le cadre du modèle EBP, les hommes interrogés étaient plus susceptibles d'inclure l'expertise dans le modèle EBP. Les répondants travaillant en cabinet semblaient moins susceptibles de comprendre le modèle EBP que les autres répondants. Enfin, le fait de posséder un diplôme universitaire supérieur était associé à une probabilité deux fois plus élevée d'inclure une expertise clinique dans le modèle EBP. Les répondants ont déclaré qu'il existe des obstacles majeurs à l'application de l'EBP : le manque de temps et l'incapacité à évaluer de manière critique la littérature ont été classés comme les deux principaux obstacles.
Dans l'ensemble, les personnes interrogées ont déclaré avoir une attitude positive à l'égard de l’EBP et que leurs connaissances en la matière étaient étendues. La majorité d'entre eux ont toutefois surestimé leurs connaissances et ont fait preuve d'une connaissance superficielle de l’EBP par rapport au modèle original décrit par Sackett et al. L'écart entre la connaissance perçue et la connaissance réelle de l’EBP est pertinent et peut entraîner une pratique inadéquate. Dans l’échantillon de cette étude, il a été constaté que les jeunes répondants connaissaient mieux l'EBP que leurs collègues plus âgés et plus expérimentés. Les conclusions sont partagées par des observations similaires selon lesquelles le niveau de connaissance de l'EBP est influencé par le temps écoulé depuis l'obtention du diplôme scolaire. En général, les diplômés récents sont plus susceptibles de suivre l’EBP que les physiothérapeutes ayant une plus grande expérience clinique.
La connaissance perçue et réelle et l'utilisation de preuves issues de la littérature scientifique diffèrent selon les répondants. Si la majorité se sentait capable de mener une recherche documentaire et d'évaluer de manière critique l'analyse statistique d'un article scientifique, peu d'entre eux ont démontré qu'ils comprenaient les résultats d'une méta-analyse avec un forest plot donné. Néanmoins, les personnes interrogées semblaient avoir une grande confiance dans la littérature scientifique publiée et ont déclaré que leurs décisions cliniques reposaient rarement sur leur seule expérience : l'attitude et la tentative d'introduire les résultats de la littérature scientifique dans le contexte clinique sont en accord avec leur attitude positive envers l’EBP.
Dans l'ensemble, les personnes interrogées ont déclaré avoir une attitude positive à l'égard de l’EBP et que leurs connaissances en la matière étaient étendues. La majorité d'entre eux ont toutefois surestimé leurs connaissances et ont fait preuve d'une connaissance superficielle de l’EBP par rapport au modèle original décrit par Sackett et al. L'écart entre la connaissance perçue et la connaissance réelle de l’EBP est pertinent et peut entraîner une pratique inadéquate. Dans l’échantillon de cette étude, il a été constaté que les jeunes répondants connaissaient mieux l'EBP que leurs collègues plus âgés et plus expérimentés. Les conclusions sont partagées par des observations similaires selon lesquelles le niveau de connaissance de l'EBP est influencé par le temps écoulé depuis l'obtention du diplôme scolaire. En général, les diplômés récents sont plus susceptibles de suivre l’EBP que les physiothérapeutes ayant une plus grande expérience clinique.
La connaissance perçue et réelle et l'utilisation de preuves issues de la littérature scientifique diffèrent selon les répondants. Si la majorité se sentait capable de mener une recherche documentaire et d'évaluer de manière critique l'analyse statistique d'un article scientifique, peu d'entre eux ont démontré qu'ils comprenaient les résultats d'une méta-analyse avec un forest plot donné. Néanmoins, les personnes interrogées semblaient avoir une grande confiance dans la littérature scientifique publiée et ont déclaré que leurs décisions cliniques reposaient rarement sur leur seule expérience : l'attitude et la tentative d'introduire les résultats de la littérature scientifique dans le contexte clinique sont en accord avec leur attitude positive envers l’EBP.

Systematic review
Dans le prolongement des publications précédentes, Zadro et al. (2019) ont proposé une revue systématique afin de vérifier si les kinésithérapeutes suivent les lignes directrices fondées sur des données probantes dans la gestion des affections musculo-squelettiques par le biais d'enquêtes auprès de physiothérapeutes, d'audits de notes cliniques et d'autres méthodes. À travers 94 études recueillies jusqu’en avril 2018, ils ont constaté que le pourcentage médian de physiothérapeutes ayant choisi les traitements recommandés était de 54 % et le pourcentage médian de patients ayant reçu les traitements recommandés par la physiothérapie était de 63 %. Pour les traitements non recommandés, ces pourcentages étaient de 43 % et de 27 %. Pour les traitements non recommandés, ces pourcentages étaient de 81 % et 45 %. Ainsi, les auteurs concluent que de nombreux kinésithérapeutes ne semblent pas suivre des lignes directrices fondées sur des données probantes dans la gestion des affections musculo-squelettiques.

Quels besoins d’informations et par quelles sources ?
La recherche bibliographique pertinente et de qualité en rapport à la question posée, l’évaluation de la fiabilité et de l’applicabilité des conclusions extraites des articles retenus, investiguer et s’assurer de la qualité des articles consultés sont autant d’étapes relevant d’une méthodologie importante dans le processus de l’EBP.
Doherty et al. (2020) ont souhaité apporter de nouvelles informations sur les ressources d'information numériques préférées des physiothérapeutes pour répondre à ces besoins. Leur étude visait à évaluer la fréquence à laquelle les physiothérapeutes éprouvent des besoins d'information, la capacité des ressources d'informations numériques à répondre à ces besoins et les types spécifiques de ressources qu'ils utilisent pour ce faire. Un total de 38 participants (tous des physiothérapeutes en exercice ; 19 femmes, 19 hommes) ont été assignés de manière aléatoire à trois questionnaires à choix multiples (QCM) de 20 questions dans trois conditions dans le cadre d'une étude croisée randomisée. L'équipe Irlandaise a pu ainsi constater que les participants ont éprouvé un besoin d'information dans 55,59 % des QCM posés lors de l’étude (conditions assistées seulement) et ont montré une amélioration moyenne de 10 % et 16 % des résultats globaux de l'examen pour les conditions de recherche fédérée et de navigateur web, respectivement, par rapport à la condition non assistée. Dans le cas du navigateur web, Google a été la ressource la plus populaire et le seul moteur de recherche utilisé, avec 1273 (64 %) des résultats, suivi de PubMed (195 résultats ; 10 % du total). Dans le cas de la recherche fédérée, Wikipédia et PubMed ont été les ressources les plus populaires avec respectivement 1518 (46 % du total) et 1273 (39 % du total) occurrences. En accord avec les résultats de précédentes études de recherche parmi les médecins, les résultats de cette étude démontrent que les physiothérapeutes éprouvent fréquemment des besoins d'informations complémentaires. Cette étude permet de mieux comprendre sur quelles ressources d'information numériques les physiothérapeutes vont pour répondre à leurs besoins. Les auteurs ont observé une préférence principalement pour les moteu